Gérard LARTIGUE

Présentez-vous…

Je suis un sculpteur. Comme je le dit toujours, c’est ce qui me définit. Mon identité c’est d’être artiste. C’est une des seules étiquettes que j’accepte. 

Quelle a été votre éducation à l’art ?

J’ai fait les Beaux-Arts. Mais, j’ai surtout appris en me rendant dans plusieurs ateliers à Paris pour apprendre directement la technique. La création, elle, elle t’appartient. C’est toi seul qui va la façonner.

Comment développez-vous, justement, ce côté créatif ?

Principalement en vivant. Le vécu. Il faut vivre : voyager, rencontrer des gens, lire. Beaucoup lire ; car c’est finalement la transmission la plus importante. Partager des expériences aussi : ne pas s’arrêter à la surface, aller le plus loin possible. C’est ça qui, avec le temps, distingue les gens qui ont une perception plus sensible des autres. C’est aussi une façon de se construire.

…prendre le temps de se connaître ?

C’est une phrase que l’on entend souvent. Pas tellement, non. C’est plutôt « connaître la vie », se découvrir dans différentes scènes, voir comment soi-même et les autres agissent.

…l’interaction de la vie sur soi ?

Exactement. C’est ça. On laisse entrer la vie en soi, on découvre. On s’approche de ses limites pour se connaître. C’est comme les gens qui boivent de l’alcool : si c’est uniquement pour s’amuser, c’est une perte d’énergie. Tandis que si c’est pour se confronter à ses limites, ok, mais quitte à le faire, autant le développer.

[rires]

Qu’est-ce qui vous a décidé à vous lancer en tant que peintre et, ensuite, sculpteur ?

J’imagine que ça a été à force d’entendre tout le temps que j’étais une personne bizarre.

[rires]

Disons que j’étais un petit peu plus sensible que les autres : les choses me touchaient davantage. J’ai grandi dans un univers d’ingénieur. Mon père était ingénieur. Tout était un petit plus carré que ce que j’aurais voulu. Tout le monde me disait que je dessinais bien – chose que je prenais à la légère à l’époque. Et puis, un jour je me suis pris au jeu. J’ai abandonné mes études d’ingénieur et je suis parti vers la peinture. Mais même en choisissant ce chemin j’évitais les diplômes, les étiquettes. Je ne voulais pas finir dans une case. Parce-que, le risque lorsqu’on fait les Beaux-Arts c’est de finir comme professeur, ce qui n’était pas mon objectif. Je suis donc parti des Beaux-Arts sans diplôme : c’était juste avant la fin de ma formation. Ça m’a évité de vouloir entrer dans le système. 

Vous travailliez à côté ?

Non. La peinture d’abord, même si je dois crever de faim. Je ne travaillais pas. Mes besoins étaient réduits au minimum. Lorsqu’on peint on peut facilement se débrouiller pour trouver du matériel. On peut même fabriquer ses propres toiles.

Y’a-t-il des techniques ou des matières que vous aimez travailler plus que d’autres ?

Actuellement c’est la pierre. Le marbre surtout.

Quelles sont vos inspirations ?

Souvent la littérature mais aussi les expériences de vie. Dès que je suis en manque de ce que l’on appelle « inspiration », il faut que je fasse quelque chose : voyager, par exemple.

Quels sont les artistes dont vous appréciez l’œuvre ?

Depuis très longtemps, un peintre et sculpteur allemand qui s’appelle Baselitz. J’aime le mouvement auquel il appartient : on les appelle les néo-expressionnistes ou néo-figuratifs. Avec Baselitz il y a aussi Gerhard Richter et Kiefer, qui vit en France. Après, dans la sculpture évidemment, Rodin, Giacometti, Michel-Ange…

Si vous deviez être un objet, lequel seriez-vous ?

Pas une pierre parce-que je me ferais taper par un sculpteur.

[rires]

Disons un livre.