Stéphan NORSIC, photographe

…se présente

Je suis photographe. Non, aujourd’hui je suis professeur de photo. Mais je suis quand même photographe, ça fait 20 ans que je fais de la photo.

Comment définirais-tu ton travail ?

Je viens du reportage, de la presse. J’ai fait ça pendant une quinzaine d’années mais ça fait 10 ans que je m’en éloigne.

J’ai voulu arrêter de travailler avec la presse parce que c’était un format qui ne me correspondait plus. Je ne m’y sentais plus à ma place. Quand tu travailles pour la presse, tu racontes la vie des autres et j’ai senti que j’avais le besoin de travailler sur des sujets vraiment personnels.

As-tu toujours mêlé ton activité de professeur de photographie avec celle de photographe ?

Oui, depuis 10 ans, depuis que j’ai commencé à donner des cours, je travaille sur des projets personnels. Au début, avec très peu d’assiduité car j’installais mon activité. Disons que je m’y suis réellement remis il y a 5 ans, avec tous les questionnements que cela suscite.

Quelle a été ton éducation à l’art ?

Ma première éducation à l’art c’est ma maman. Elle adorait qu’on aille dans les musées pour aller voir des expositions de peinture impressionniste. J’avais une dizaine d’années à cette époque-là et j’adorais ça, je buvais ses paroles. C’était aussi sa bulle d’oxygène.

Je dessinais partout à l’école, ce qui, par ailleurs, plaisait peu à mes professeurs. Pour ma première communion, on m’a offert une boîte de peinture à l’huile, je me suis donc mis un petit peu à la peinture. J’ai aussi joué à la guitare, regardé beaucoup de films et pris des cours aux Beaux-Arts – mais sans réellement m’investir. 

Ensuite, à 30 ans, j’ai fait une formation de photojournalisme. 

Comment as-tu découvert la photographie ?

Ma maman. Mes parents avaient un bel appareil photo. Quand on allait se balader en forêt elle m’expliquait ce qu’était un diaphragme ou une profondeur de champ. 

Vers 16 ans, à l’adolescence, je me suis inscrit dans un club photo et c’est là que je me suis mis à faire de la photo. Dans ce club photo il y avait un esprit de compétition que je n’aimais pas. Mais je fais rapidement la connaissance d’un ami et qui se débrouillait bien mieux que moi et il m’apprend à utiliser le format noir et blanc, il m’apprend tout en fait. C’est passionnant. On partage beaucoup.

J’ai arrêté la photo vers 25 ans, j’ai eu d’autres activités, j’ai été surveillant, professeur, animateur en club photo… Je continuais à avoir une activité en photo mais sans réellement en faire. 

À l’âge de 30 ans je suis tombé par hasard sur une annonce dans un journal pour passer un concours qui me permettait d’entrer dans une école à Paris. J’ai été reçu. C’est à ce moment-là que j’obtiens ma carte de presse et que je rencontre des photographes professionnels, des photographes de presse, des photojournalistes… Je découvre un univers fantastique très éloigné de mon club photo.

Quelles sont tes inspirations ?

Les autres formes d’art. J’adore trainer dans les musées d’art, aller au vernissage du Palais de Tokyo, aller voir les expositions d’art contemporain. J’aime voir ce qu’il se fait, ça me fascine. Je trouve ça très inspirant. 

Le travail des autres photographes m’inspire aussi, ça me permet de me tenir au courant.

Les voyages sont également de réelles sources d’inspiration.

Ces autres formats, influencent-ils ton travail ?

La référence à la peinture a été trop présente pour moi. Par exemple, je me rends compte que je ne supporte plus la netteté. Les appareils photos sont trop précis et ils manquent parfois de poésie. Mais au-delà de ça, je ne souhaite pas que mon travail entre dans une case, soit référencé, soumis à des règles ou les enfreignent. Ça soulève aussi la question du maniérisme.

[Stéphane me montre une série de portrait récemment réalisée]

Je suis en train de travailler cette série, je la trouve inspirante, elle résonne. Ça me plaît.

Quelles sont les techniques et/ou matières que tu aimes travailler ?

Disons que je mets en place des façons de procéder. Il y a différentes choses que j’aime bien faire. J’adore me balader dans la rue et faire des photos, où que ce soit.

Voyager à l’étranger est un super prétexte pour aller découvrir. Arriver à sortir des images épatantes c’est fantastique. 

Je connais ma façon de procéder, j’ai su la mettre en place et avec le temps, je parviens à l’améliorer. Par exemple, j’ai longtemps travaillé avec la couleur et je reviens petit à petit vers le noir et blanc. Ça évolue. Les choses que je fais en photo sont systématiquement des procédés : photos de rues, essais sur humain au studio et le photoreportage qui évolue et duquel je me détache.

Connais-tu les modèles qui posent pour toi ?

Non. Je poste des annonces et des gens se proposent.  En ce moment je photographie le nu donc tous mes copains n’ont peut-être pas envie de poser nu… Les dernières expérimentations se sont faites sur des personnes jeunes. J’ai essayé avec des personnes âges, des personnes qui ont de l’embonpoint. C’est passionnant, mais très compliqué. 

[réflexion sur la facilité qu’ a un photographe à photographier une morphologie filiforme, le grotesque des formes corporelles opulentes – référence à Peter Lindbergh]

La photographie est crue. Elle t’autorise à poser ton regard, contrairement à la réalité. En photo il manque la parole, l’expression, la jovialité de la personne. La personne n’est rapidement plus qu’un volume, un physique.

Quels sont les artistes dont tu apprécies l’œuvre ?

Il y en a trop. Je ne saurais pas dire. En plus, j’en découvre régulièrement, il va en manquer. 

[hésitation]

Après avoir expérimenté le noir et blanc et en me mettant à la couleur je suis rapidement impressionné par le travail des coloristes comme Harry Guyaert ou Stephen Shore. Ce sont des photographes de chez Magnum.

En amont, j’apprécie aussi H.Cartier-Bresson

Sinon, Depardon ou Koudelka. 

Ensuite il a plein de jeunes photographes, beaucoup produisent des travaux extraordinaires et ont du talent.

Je viens du format photojournalisme, alors j’aime les travaux cadrés, organisés. Les compositions pensées et soignées me parlent. Au contraire, d’autres courants comme l’instantané, me parlent moins. J’attache une importance à la composition.

Si tu devais être un objet, lequel serais-tu ?

Un objet ? Aucune idée. Je n’ai jamais pensé à ça. C’est une drôle de question.

[hésitation]

Une machine de téléportation. J’aimerais pouvoir me dématérialiser pour me matérialiser de nouveau ailleurs. J’adore voyager. 

Où pouvons-nous trouver ton art ?

Ici, dans mon atelier ou sur mon site web. Je n’expose pas en ce moment. Mais, après 15 ans passés dans la presse, j’ai envie de monter mon travail. J’y travaille en parallèle de mes cours de photo.